Interview de D Le Boeuf par Hospimédia
13.02.09 - HOSPIMEDIA - Dominique
Le Bœuf, infirmière et sociologue, préside le premier Conseil national
de l’ordre des infirmiers (CNOI) dans une actualité de réformes. Ce qui
n’empêche pas le CNOI d’être d’ores et déjà opérationnel et
de prendre clairement position contre un grade licence dans la réforme des
études infirmières.
Hospimedia : "Le Conseil national de l'ordre
des infirmiers a tenu la semaine dernière sa première séance plénière
pendant laquelle un certain nombre d'axes de travail ont été évoqués.
Quelle est selon vous sa priorité ? Dominique Le Boeuf
H. : Le calendrier est-il déterminé ?
D. L. B.
: Il faudra certainement une
année pour aboutir à la mise en place de ce code. Le cheminement jusqu'au
code de déontologie peut être comparé à celui pris par la Haute autorité
de santé lorsqu'elle conçoit ses recommandations de bonnes pratiques
professionnelles. Son élaboration nécessitera un travail important sur
chaque article. Toutes les infirmières quelle que soit leur pratique
devront pouvoir s'y retrouver. Un travail de relecture important
s'annonce également dans les départements, en région et auprès de
personnalités qualifiées. Le conseil national va prochainement désigner
une personne chargée de piloter le travail de mise en place du futur code
de déontologie.
H. : En ce qui concerne la réforme de la formation
infirmière, le conseil national s'est aussi déclaré dans sa majorité
contre le "grade licence"...
D. L. B.
: Effectivement, ce choix
positionnerait la France comme un cas d'exception. Le grade licence ne
correspond pas aux modèles européens des filières LMD existantes en
sciences infirmières... c'est pourtant un choix qui semble clairement
proposé.
H. : Vous rencontrez officiellement Roselyne
Bachelot aujourd'hui, quel message souhaitez-vous lui porter ?
D. L. B.
: Je pense sincèrement la
remercier pour avoir conduit le processus électoral de mise en place de
l'ordre des infirmiers jusqu'au bout et d'avoir soutenu sa création.
Cette décision n'était pas simple ni politiquement ni techniquement. Je
lui ferai aussi part de nos préoccupations concernant l'intégration des formations
infirmières à l'université ou les propositions d'amendements qui lui ont
été transmises via notamment le conseil régional de l'ordre des
infirmiers d'Ile-de-France au sujet du projet de loi HPST. L'ordre
demande notamment la réintégration dans le cadre du conseil de
surveillance de représentants de la commission des soins infirmiers, de
rééducation et médico-techniques. Il est important de garder dans ce
cadre une expertise en soins infirmiers. Nous souhaiterions également que
l'article concernant la coopération des professionnels intègre l'avis des
ordres. La présence de représentants de notre ordre me semble également
légitime au sein des conférences régionales de santé.
H. : Quels sont les débats auxquels l'ordre des
infirmiers pourrait être désormais associé ?
D. L. B.
: Il n'est pas pour l'instant
prévu que l'ordre des infirmiers ait des représentants officiels au sein
des conférences régionales de santé. Ce serait pourtant légitime. L'ordre
n'a pas non plus été saisi pour participer à la mise en oeuvre du plan
Alzheimer. Les infirmières se trouvent pourtant largement au coeur de ces
prises en charge et auraient beaucoup de choses à dire. Sur un autre
sujet, j'ai participé au ministère le 26 janvier aux retours
d'expériences sur les soins de proximité et la continuité des soins. Et
je viens d'être désignée comme personnalité pour siéger au Haut conseil
des professions paramédicales (HCPP).
H. : Quelle sera la ligne de conduite de l'ordre des
infirmiers ?
D. L. B.
: Je souhaite une grande
rigueur et une grande transparence. Il me semble important de limiter
mais non rationner les frais inhérents à une telle structure. Il est en
effet nécessaire de construire la "maison". Et certains axes
fondateurs nécessiteront un important investissement. Nous devrons par
exemple disposer d'une équipe juridique solide et d'un pôle chargé de
notre communication qui doit être opérant sur les trois niveaux. Il
faudra aussi trouver un lieu susceptible de nous accueillir. Sans oublier
la gestion de l'inscription au tableau de l'ordre. Pour des raisons de
fonctionnement comme d'autres ordres avant nous, nous souhaitons un
allongement et une harmonisation de tous les mandats ordinaux qui
seraient de 3 ou 6 ans au lieu de 2 ou 4 ans (avec toujours le
renouvellement de la moitié des élus à mi-mandat soit désormais tous les
de 3 ans, NDLR). Cela éviterait à l'ordre des infirmiers à peine installé
de repartir pour une nouvelle campagne électorale et donc de travailler
mieux sur les sujets de fonds.
H. : Qu'en est-il aujourd'hui de la cotisation,
source de diverses polémiques ?
D. L. B.
: La cotisation sera soumise à
l'avis des différents conseils départementaux et régionaux de
l'ordre des infirmiers. L'échelon local est primordial car il est proche
des pratiques. Depuis le mois d'avril 2008 où ils ont été créés, ils ont
prouvé leur capacité à s'organiser sans moyen. Face à ce constat, on ne
peut plus dire aujourd'hui que l'ordre des infirmiers était le rêve de
quelques illuminés. Une réunion regroupant tous les départements et
régions sera donc organisée. Ils pourront alors donner leur avis afin que
nous puissions convenir ensemble d'un montant de cotisation acceptable
par toutes les infirmières mais aussi raisonnable pour permettre le
fonctionnement mais aussi l'indépendance de l'ordre. Cette étape doit se
faire rapidement mais sans précipitation."
Propos recueillis par Lydie Watremetz